Méditation pour la fête de Pâques « A », le 12 avril 2020
Ac 10, 34a.37-43 ; Col 3, 1-4 ; Jn 20, 1-9
« Il est ressuscité, il est vivant ! »
Dans son message du 27 mars 2020, le Pape François disait : « D’épaisses ténèbres couvrent nos places, nos routes et nos villes ; elles se sont emparées de nos vies en remplissant tout d’un silence assourdissant et d’un vide désolant, qui paralyse tout sur son passage : cela se sent dans l’air, cela se ressent dans les gestes, les regards le disent. Nous nous retrouvons apeurés et perdus ». Cette nuit, ce silence dont parle le Pape François nous renvoient à la nuit et au grand silence du Samedi Saint et malgré ce silence, le murmure de la vie est à l’œuvre dans les tréfonds du séjour des morts où Jésus est descendu.
C’est au premier jour de la semaine, que Marie Madeleine se rend au tombeau le grand matin. Elle voit que la pierre qui empêchait toute possibilité de vie et de lumière, a été enlevée du tombeau, mais le Seigneur est absent. Elle va dire à Pierre et le disciple que Jésus aimait, que le tombeau est vide et par là-même, elle dévoile le vide de son cœur. Devant une épreuve : deuil, maladie, pandémie, nous sommes, nous aussi, devant un vide. Nous essayons de chercher un secours autours de nous. Nous n’avons parfois rien sur lequel nous accrocher. C’est le vide dans nos vies, qui n’est pas nécessairement un vide parce que rempli de la présence de Dieu, encore insaisissable pour nous.
C’est l’expérience que vont vivre Pierre et l’autre disciple. Ils courent eux aussi vers le tombeau pour voir ce qui s’est passé. Dès leur arrivée, Pierre ose entrer dans le tombeau, il affronte le vide. Il voit le linceul et le linge qui recouvrait la tête, bien rangés. De ce regard précis, il ne tire aucune conclusion. A son tour, l’autre disciple entre, il voit et il croit. Il fait l’expérience troublante et mystérieuse que ce tombeau vide n’est pas vide du tout. Il est rempli de la présence de Dieu, et de la joie, de la lumière et de l’espérance. Grâce à l’intelligence de la foi, il comprend qu’il s’agit d’une Bonne Nouvelle : Le Christ est ressuscité d’entre les morts. Il est vivant !
Insensiblement, cette expérience a ouvert un espace au plus intime de leur vie permettant au Vivant d’y prendre place. Celui qui est mort est en train de les ressusciter, eux, les perdus de Pâques. En eux, en ces premiers témoins du tombeau vide, on pourra désormais discerner le Vivant, la présence d’amour du Ressuscité. En écoutant bien, on peut entendre, au-delà de tous les bruits du monde qui nous poussent au découragement, à la haine ou au désespoir, résonner cette voix, cette présence, qui vient nous répéter dans le silence du cœur ce qu’elle disait aux femmes et aux apôtres par le passé : « Ne craignez pas, n’ayez pas peur, la paix soit avec vous. J’ai vaincu le monde et je suis avec vous jusqu’à la fin des temps ».
Le témoignage de Marie-Madeleine et les apôtres, suffit pour fonder notre foi : Jésus n’est pas resté prisonnier de la mort, il a vaincu la mort, il est ressuscité. La résurrection n’est pas seulement un évènement arrivé à Jésus, elle touche aussi celles et ceux qui mettront en lui leur foi et leur espérance. Pâques, c’est aussi la fête de notre propre résurrection et le commencement d’un monde nouveau. C’est heureux de pouvoir le redire au cœur de la tempête que nous vivons. Jésus est dans la barque avec nous, il ne nous abandonne pas à notre triste sort. Mieux, dans sa victoire sur la mort et les forces de mort, il nous ouvre déjà un chemin de vie éternelle.
Pâques, c’est une mission qui commence et qui continue aujourd’hui à travers nous. Dans le contexte d’aujourd’hui, les chrétiens sont appelés à être des porteurs de vie et d’espérance, à accompagner, à soutenir, à prier, à témoigner, à soulager par la parole et par les actes, comme le font : médecins, infirmiers et infirmières, employés de supermarchés, agents d’entretien, fournisseurs de soin à domicile, transporteurs, forces de l’ordre, volontaires, prêtres, religieuses et tant et tant d’autres qui ont compris que personne ne se sauve tout seul. A défaut de pouvoir le vivre directement en raison du confinement, on peut se le dire par téléphone ou d’autres moyens de communication, surtout pour ceux qui sont encore plus fragilisés par ce confinement et qui le vivent comme un abandon.
Croire en Jésus vivant, c’est sans doute décider de nous lever et de nous mettre en chemin, dans la conviction intime que c’est le Vivant qui nous soulève. Croire en la résurrection, c’est aussi envisager notre foi comme une forme de protestation par rapport à toutes ces situations qui nous découragent et nous désespèrent, tout cela en choisissant toujours la vie plutôt que la mort. Invitons le Christ ressuscité dans les barques de nos vies. Confions-lui nos peurs, pour qu’il puisse les vaincre. Il apporte la sérénité dans nos tempêtes, car avec Dieu la vie ne meurt jamais.
Si le Christ est sorti libre et vainqueur du tombeau, nous sortirons, nous aussi de cette crise sanitaire, libre de toute peur, d’incertitude, d’isolement du cœur et d’esprit. S’il est ressuscité et vivant, il fait de nous des hommes et des femmes debout et vivants, porteurs d’espérance, de joie de Pâques et solidaires avec tous nos frères et sœurs en humanité touchés par cette pandémie de près ou de loin. Comme le dit le Père Cantalamassa, ofm : « Nous aussi, après ces jours que nous espérons courts, nous nous lèverons et sortirons des tombeaux que sont devenu nos maisons. Non pas pour revenir à l’ancienne vie, mais à une nouvelle vie. Une vie plus fraternelle, plus humaine. Plus chrétienne ! »
Bonne fête de Pâques à chacune et chacun !